Les évêques du Sénégal, par le biais de Monseigneur Benjamin Ndiaye, viennent de sortir un communiqué pour dire stop aux violences notées dans l’ensemble du territoire sénégalais. Ils ont par ailleurs prié pour un retour au calme.
« La vérité fera de vous des hommes libres » (Jn 8,32)
Chers Concitoyens Sénégalais, et vous hôtes de notre pays, « La vérité fera de vous des hommes libres » (Jn 8,32).
Ce sont ces paroles de Jésus, dans l’Évangile de Saint Jean, qui nous viennent à l’esprit, à la lecture des événements qui secouent la vie de notre cher pays, le Sénégal, depuis quelques jours.
C’est pourquoi, Nous, évêques du Sénégal, après avoir suivi, non sans inquiétude, ces événements, avons estimé de notre devoir, dans l’exercice de la responsabilité pastorale qui est la nôtre, de prendre la parole pour exhorter tous nos chers compatriotes, à tous les niveaux, à faire preuve de raison, de sagesse et de civisme, dans l’intérêt supérieur de notre Nation.
Comme vous pouvez le deviner, notre prise de parole de ce jour a été précédée par la prière, puisque nous assumons aussi une mission d’intercession auprès de Dieu pour son peuple dont nous sommes pleinement solidaires. Nous continuons à prier, pour que le Seigneur, le Tout-Puissant, protège notre pays et tous ses habitants ; pour qu’il apaise les cœurs et éclaire les esprits ; qu’il inspire nos paroles, nos faits et gestes, afin que ce que nous disons et faisons contribue à la gloire de Dieu, à la paix et à notre sauvegarde !
Comme Pasteurs de son peuple, Dieu nous appelle aussi à assumer nos responsabilités morales et spirituelles dans la vie de notre nation. Or, les événements graves qui secouent actuellement notre pays, dans le contexte de pandémie de la Covid 19, ont montré comment nous pouvions basculer dans une violence aveugle, susceptible de menacer notre cohésion sociale, si nous nous laissons dominer par nos passions et nos intérêts personnels.
La tentation de la violence se tapit en chacun de nous. Elle peut prendre différentes formes : de la violence verbale qui embrase et attise le feu, à la violence physique qui blesse et tue, jusqu’à la violence immorale qui dévie les intelligences et manipule les consciences.
C’est ainsi qu’à la suite d’un fait social dont la presse a rendu compte, à travers divers organes, notre pays est entré dans une spirale de violence qui témoigne d’une crise profonde au sein de notre société sénégalaise. Mais cette crise n’est-elle pas un miroir de ce qui se tapit ou de ce qui sommeille en nous ? Ne nous appelle-t-elle pas alors à mesurer nos responsabilités et à nous ressaisir, nous tous, et à tous les niveaux, du sommet de l’État au citoyen, en passant par toutes les Institutions étatiques, les structures économiques, sociales, culturelles, religieuses, au nom du respect de la vie humaine et du Bien Commun ?
Comment ne pas nous incliner, avec douleur et contrition, devant la mémoire des victimes de la crise que nous vivons présentement ? Des vies humaines ont été arrachées à l’affection des leurs, par suite du déchaînement d’une violence aveugle ! Des blessés graves vont porter les séquelles de notre violence durant le restant de leur vie. Des biens publics et privés, fruits d’un patrimoine acquis par le travail, ont été saccagés, pillés, volés, en dehors de toute considération morale, éthique, défiant toute justice, rendant encore plus précaire la situation de nombreux travailleurs et de leurs familles.
Membres d’une même communauté, dans un pays qui s’honore pourtant d’être celui de la Teranga, il nous faudra du temps, pour guérir des nombreux traumatismes subis ces jours-ci !
Pendant qu’il est encore temps, efforçons-nous alors de limiter les dégâts, et même de les arrêter.
Arrêtons l’engrenage de la violence ! Nous le pouvons et nous le devons, non seulement en défendant nos droits, mais aussi en assumant nos devoirs, pour asseoir les conditions idoines d’un meilleur vivre ensemble. Privilégions le dialogue qui n’est possible que dans un climat de paix et de sérénité. Exhortons-nous tous et chacun à faire cause commune, pour sauver notre nation. Tous : Gouvernement, Forces de défense et de sécurité, manifestants, acteurs et partis politiques, chefs religieux, société civile, parents, simples citoyens. C’est possible, et nous le devons au Créateur, auquel nous croyons, qui attend de nous tous un engagement sincère et vrai, en vue du bien de tous. Nous le devons aussi aux jeunes générations qui attendent de leurs aînés d’hériter des idéaux de vérité, de droiture, de justice, d’entente et de paix, comme un précieux patrimoine reçu de nos ancêtres.
Que Dieu bénisse le Sénégal et tous ses habitants. Qu’il fasse souffler dans nos cœurs et nos esprits un vent de réconciliation et de paix comme nous y invite sa Parole : « J’écoute : que dira le Seigneur Dieu ? Ce qu’il dit, c’est la paix pour son peuple et ses fidèles ; qu’ils ne reviennent jamais à leur folie ! (…) Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent ; la vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice » (Ps 84, 9.11-12).